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lundi 27 décembre 2010

Joyeux Noël

Les enfants, l'équipe de l'orphelinat et celle de Siwol vous souhaitent d'excellentes fêtes de fin d'année!
The children, the staff of the orphenage and Siwol wish you a merry Christmas and a happy new year!

lundi 29 novembre 2010

Miaaam !

L’hiver étant maintenant bien installé en Europe, je saisis cette occasion pour vous parler d’un sujet épicé et chaud, qui j’espère, vous fera oublier le froid ambiant ! Tous ceux qui ont déjà voyagé ou vécu en Inde saisiront probablement tout de suite l’importance du sujet traité dans ce post : la nourriture !

En effet, la nourriture tient une place très importante dans la culture indienne. Il faut bien manger et si possible en quantité ! Si vous êtes reçus quelque part, on vous servira forcément à manger (l’heure n’important pas) et en tant qu’hôte il est préférable de manger pour rendre heureux ceux qui vous reçoivent. La nourriture de base est, comme dans la plupart des pays asiatiques, le riz, qui s’accompagne de différents dals ou légumes. Mais il existe beaucoup d’autres plats, plus ou moins sophistiqués en fonction des ressources disponibles. Ainsi, par exemple, les dosas et les idlis sont des plats typiques de l’Inde du Sud servis au petit déjeuner et souvent appréciés des touristes.

Idli, délicieux petit déjeuner typique de l'Inde du Sud (sorte de gâteaux de riz)


Le repas est le plus souvent composé d’un seul plat principal. Il est très répandu de manger sans couvert, en se servant uniquement de ses doigts. Pour ceux qui ne l’ont jamais fait, c’est une expérience à tenter, très amusante et qui, selon moi, change quelque peu le rapport que nous pouvons avoir à la nourriture !

Au sein de l’orphelinat, les petites filles mangent trois repas par jour : petit-déjeuner, déjeuner et dîner (parfois un goûter). Elles mangent assises par terre (comme la plupart des familles indiennes) en cercle dans la grande salle qui sert également de dortoir. Laxmi, Suli, Shiwama et Prema préparent tous les repas et surveillent attentivement que chacune ait fini son assiette avant de pouvoir se lever.

Les petites filles mangent en cercle, assises de la plus grande à la plus petite. Gare à celle qui ne finit pas son assiette !

Le petit déjeuner, servi vers 8h20 avant d’aller à l’école, est très différent de ce qu’on peut imaginer en France ou en Europe. Il compte quatre variantes :

- Le rotti qui est une sorte de crêpe relativement épaisse faite à partir d’une farine spéciale. Les plus jeunes en mangent un tandis que les plus âgées en mangent en général deux. Le rotti est accompagné de légumes.

- Les chapathis qui sont également des sortes de crêpes mais faites à partir d’un type de farine de blé complet. Plus légers que le rotti, la plupart des enfants en mangent au moins deux. Ils sont également accompagnés de légumes.

- Le Uppittu est fait à partir de graines que l’on pourrait comparer à celle utilisées dans le couscous que nous connaissons en Europe.

- Le riz accompagné de légumes (c'est plus rare pour le petit déjeuner)



Le matin, Prema et Laxmi préparent les chapathis pendant que les petites filles font leur yoga et leurs devoirs


Le déjeuner (12h) et le dîner (19h30) sont quant à eux composés invariablement de riz accompagné d’un dal d’haricots, de pois ou de lentilles. Environ une fois par semaine, elles mangent de la viande : en général du poulet qui est la viande la plus abordable ou bien du gibier rapporté par le mari de la directrice qui pratique la chasse.

Prema va elle-même au marché acheter les légumes et tient un détail extrêmement précis des rations, dans la mesure où ces dépenses représentent une part importante de son budget quotidien.

Aussitôt ramenés du marché, les légumes sont épluchés, coupés puis finalement cuisinés par Shiwamma et Suli

Les enfants mangent très peu de produits laitiers, notamment en raison du prix de ces derniers, mais aussi parce qu’en Inde et en Asie de manière générale, il est beaucoup moins courant de boire du lait et de manger des yaourts ou du fromage qu’en Europe ou en Amérique du Nord. L’Inde représente d’ailleurs un marché potentiel immense que les industries laitières européennes et nord-américaines cherchent aujourd’hui à conquérir et où elles ont commencé leur travail de lobby et de publicité.

Les fruits sont également une denrée assez rare au sein de l’orphelinat en raison des prix. Dans l’échelle des valeurs, la pomme se situe tout en haut aux yeux des enfants, car elles n’en reçoivent pas régulièrement. Lorsque Prema leur en donne, elles les mangent dans le plus grand silence en en savourant chaque bouchée ! Les bananes, plus abordables, sont en revanche plus fréquentes.

Les sucreries sont quant à elles distribuées avec parcimonie. Les enfants reçoivent des caramels après la messe le dimanche et de temps en temps Prema leur distribuent des sucreries l’après-midi, ce qui fait la joie des enfants…et des aides-maison !

Le rituel des sucreries : chaque enfant reçoit deux poignées de sucreries dans chaque main...


Si les repas peuvent à première vue sembler assez peu variés, il faut savoir que les petites filles de l’orphelinat bénéficient de repas plus équilibrés que la plupart des enfants de Sirruguppa et que dans leurs familles d’origine, elles n’avaient le plus souvent qu’un ou deux repas par jour composé uniquement de riz avec de la poudre de piment.

La directrice est consciente de l’importance de la nutrition pour des enfants si jeunes et veille tous les repas à ce que les rations servies soient adaptées à chacune des enfants, en fonction de leur âge, de leur taille, de leur faim ainsi que de leur état physique du moment. A leur arrivée à l’orphelinat, certaines petites filles étaient extrêmement réticentes à manger les légumes qu’on leur servait car elles n’en avaient jamais mangés, voire vus auparavant. Il en allait de la même pour la viande. Aujourd'hui, toutes les petites filles mangent de tout... et en redemandent le plus souvent !

mardi 19 octobre 2010

L’éducation des petites filles au cœur du projet de l’orphelinat

Voilà maintenant plusieurs semaines que je suis revenue de Siruguppa où j’ai passé deux mois au sein de l’orphelinat avec Prema et les enfants. De nombreuses choses m’ont touchée lors de mon séjour. Parmi elles, la condition des femmes m’a particulièrement interpellée, si bien que je souhaiterais revenir sur cet élément crucial de l’environnement de l’orphelinat. La condition des femmes de manière générale dans les régions pauvres de l’Inde constitue en effet un élément fondamental à prendre en compte si l’on veut comprendre le contexte de l’orphelinat mais aussi l’enjeu que ce dernier représente très concrètement pour l’avenir des petites filles.



La condition des femmes indiennes est connue et dénoncée à de nombreux niveaux, que ce soit dans les média, les ONG, etc. En partant en Inde cet été, je pensais donc avoir une certaine connaissance de ce sujet. Pourtant, mon séjour à l’orphelinat m’a fait prendre conscience des conditions de vie des femmes, et souvent de leur détresse. Quoique tristes et souvent insupportables au plus haut point, ces témoignages n’ont fait que rendre à mes yeux l’existence de l’orphelinat d’autant plus cruciale. En effet, outre le système de caste et le système des devadasis (c'est-à-dire un système de prostitution « traditionnelle » plus ou moins institutionnalisée et forcée, sur lequel nous reviendrons), les violences conjugales et la soumission des femmes aux hommes permettent de rappeler, s’il était besoin, tout ce que représente l’orphelinat Ingrid Nava Jeevana pour les petites filles qu’il accueille.

Il vise à faire d’elles de futures jeunes filles et femmes indépendantes et autonomes.

La condition des femmes en Inde, en particulier dans les régions peu développées comme celle où se trouve l’orphelinat, est extrêmement difficile et précaire. Dans la zone de l’orphelinat (zone rurale), quel que soit le milieu social, que l’on soit musulman, chrétien ou hindou, et quelle que soit sa caste parmi les hindous, le destin de chaque femme est conditionné par son mariage et la personnalité de l’homme qu’elle épouse, sachant que la quasi-totalité des mariages à ce jour sont des mariages arrangés par les parents. Il s’agit donc en quelque sorte d’une loterie où les véritables gagnantes sont rares : si le mari attribué à telle femme est violent, alcoolique, dépensier, ou tout cela à la fois, la femme n’aura d’autre choix que de subir. Elle ne pourra, dans la plupart des cas, ni lui faire de reproches, ni divorcer, ni se plaindre auprès de qui que ce soit.

Et de fait, la violence conjugale est particulièrement développée. Prema, qui a tissé des relations de confiance avec de nombreuses femmes (de toutes religions, de toutes castes et de tous niveaux de richesses) de la région, reçoit régulièrement chez elle la visite de femmes, qui sont à bout et ne supportent plus la violence permanente et intolérable de leurs maris. Pour certaines d’entre elles, Prema est le dernier recours avant le suicide. Ces femmes sont en effet littéralement seules au monde : parfois coupées de tout lien avec leur propre famille depuis leur mariage et rejetées par leur belle-famille si celui-ci vient à mourir, quasi systématiquement battues par leur mari,... Prema essaie de les aider de son mieux, en fonction de leurs situations respectives : organiser une rencontre entre le mari, la femme et les « aînés » de leur caste/religion (qui vont jouer un rôle de médiation), rencontrer l’employeur du mari pour faire pression, rencontrer les parents du mari ou de la femme, aider la femme à trouver une activité génératrice de revenus pour être financièrement moins dépendante de son mari, etc.

Autant de destins malheureux qui viennent rappeler les objectifs de l’orphelinat : offrir un autre avenir aux petites filles que celui que leurs parentes et voisines ont reçu. Offrir des perspectives de vie meilleure à ces petites filles, mais aussi contribuer, même à une échelle modeste, à changer les mentalités.

Cette situation illustre d’ailleurs l’écart qui existe entre une législation de plus en plus favorable aux femmes dans de nombreux domaines, et la réalité de la condition féminine sur le terrain. A cela s’ajoute la complexité du droit familial en Inde, qui dépend de la religion des protagonistes, il existe en effet un code civil hindou (qui s’applique aussi aux sikhs, jaïns et bouddhistes, soit près de 85% de la population), un code musulman (environ 13% de la population), un chrétien (2, 3%) et un parsi. Le code personnel hindou est très proches des « normes occidentales » en matière de divorce, mais les codes musulman et chrétien sont sur certains aspects, comme le droit des femmes à demander le divorce et le droit à une pension alimentaire, moins avantageux pour les femmes. Toutefois, en cas de violence conjugale, tous les codes civils accordent le droit de divorce, et le problème vient plutôt du fait qu’être une divorcée est une position sociale particulièrement peu avantageuse. Pour les hindoues et les chrétiennes particulièrement, le divorce est souvent incompatible avec leurs propres convictions religieuses. Il n’existe pas de chiffre officiel, mais d’après la BBC (http://www.bbc.co.uk/news/10284416) seulement 1,1 % des mariages se terminerait par un divorce en Inde. Si ce chiffre souligne la solidité de l’institution en Inde, ce qui n’est d’ailleurs pas négatif, il rend évident le caractère encore socialement anormal du divorce dans ce pays. De plus, l’absence d’autonomie financière des femmes rend difficile l’entreprise souvent longue qu’est le divorce, d’autant plus qu’elles ne peuvent pas toujours compter sur l’aide de leur famille, qui ne souhaite pas forcément partager leur « honte », ou qui n’a pas toujours les moyens financiers de les entretenir (notamment parce que marier une fille est un événement particulièrement couteux en Inde).


Seules l’éducation et l’indépendance qui en résulte permettra aux petites filles d’échapper à un tel destin. Leur présence au sein de l’orphelinat leur permet donc non seulement d’échapper à une enfance qui n’en est pas une mais aussi de fuir un déterminisme malheureusement prégnant pour beaucoup de petites filles indiennes des régions pauvres.

C’est pourquoi Prema insiste sur la réussite scolaire des petites filles et leur éducation sociale en général. Les petites filles reçoivent en effet une instruction très stricte et Prema nourrit des ambitions pour toutes, en espérant que chacune trouvera sa voie et s’épanouisse dans ce qui lui plaît le plus, que ce soit les études, la danse, le sport, la musique…

Si l’éducation, et partant l’indépendance matérielle et financière permettront aux petites filles d’être libres et autonomes, l’indépendance d’esprit et la confiance en soi constituent des facteurs tout aussi fondamentaux. C’est pourquoi, au-delà du seul travail scolaire, elles font de nombreuses activités qui leur permettent de développer ces qualités.